Depuis de nombreux mois, des particuliers, des associations s'émeuvent des conditions de vie des familles Roms sur le territoire de Noisy le Grand. Rien sur le plan sanitaire (eau, bennes à ordures, etc...). Interpellations de la mairie, du conseil général, du député ou du préfet, rien n'y fait... Seules les actions concrètes d'une solidarité élémentaire - ONG de médecins, Rom Europe, initiatives locales individuelles ou collectives - restent les réponses à cette incroyable situation que dénonce aussi depuis des mois, excusez du peu - un commissaire européen, alors même que des fonds ... européens, eux aussi, restent disponibles, semble-t-il... Banal, direz-vous, on en parle depuis tellement longtemps maintenant, tout comme on évacue aussi depuis tellement longtemps !
Eté 2012 : plusieurs associations tentent d'aider les quelques familles qui le souhaitent à obtenir leur domiciliation auprès du Centre Communal d'Action Sociale de la ville. C'est important, en effet, de le faire pour pouvoir inscrire les enfants à l'école et des enfants. Et il y en a dans les bidonvilles, des tout petits même, vous savez, ceux que chez nous l'on appelle des nourrissons, des bébés, des nouveaux nés... Il parait même que des mots qui veulent dire la même chose existent du côté de la Roumanie ou de la Bulgarie ...
Niet, Nada, No, Nein, peu importe la langue, la réponse est NON. Pas de domiciliation, pas d'inscription dans les écoles noiséennes ! Et ce, malgré la loi républicaine, malgré l'affirmation d'une ministre du gouvernement Ayrault, apôtre du "changement maintenant".
Pourtant, il y a quelques jours, en préfecture lors d'une réunion sur les conditions de vie des familles Roms, il semble bien que cette question ait été abordée, y compris en présence d'un représentant de la ville de Noisy le Grand.
15 octobre 2012 au petit matin par 6 degrés Celsius - on le pressentait mais pourquoi une telle précipitation alors même qu'aucune autre solution n'a été proposée ni abordée avec les familles et les associations qui les accompagnent du mieux qu'elles le peuvent - , la police et les engins de démolition sont là.
On expulse par décision de justice, tout comme du temps de Sarkozy et de Fillon. Cherchons l'erreur ! Faut évacuer, faut partir, faut abandonner le campement de "fortune", faire le baluchon, porter en protégeant les tout petits et aller se faire voir ailleurs !
Mais quel ailleurs ? Avec quels débris de cabane ? Avec quels morceaux de toile de tente ? Dans un autre camp ? Dans une autre ville ?
A force de renvoi de commune en commune, on va finir par arriver à ouvrir un grand bidonville, un grand camp...
De sinistre et triste mémoire que l'idée même d'un grand camp ! Mais où va-t-on dans cette logique infernale qui montre du doigt, qui exclue depuis des mois 15 000 européens sur le territoire national pour 65 millions d'habitants ?
Faut dire qu'on l'a perdu, cette fichue mémoire ! Oublié le bidonville - le 116 aujourd'hui - du Père Wresinski d'Atd Quart Monde à Noisy le Grand ! Oublié le grand bidonville de Champigny avec ses centaines de familles portugaises fuyant la détresse économique, les guerres coloniales et la dictature ! Oubliés les bidonvilles de la couronne parisienne des années 60-70 pour les travailleurs émigrés qui allaient pourtant travailler à l'usine... Renault, Citroen, le BTP et bien d'autres secteurs d'activités devraient ouvrir leur archives ...
A Noisy le Grand, depuis ce matin, plusieurs dizaines de personnes, adultes et enfants, "campent" devant la mairie en espérant qu'une délégation sera reçue par le maire, son cabinet ou un autre élu pour aider à trouver une autre solution provisoire, pour la bâtir avec patience car l'on sait qu'il n'y a pas de solution miracle.
La police municipale est requise, tout comme la nationale d'ailleurs. On ne passe pas ! Personne ne sera reçu et quelques heures plus tard, la situation est inchangée. Sans doute l'expression du courage politique qui fait assumer les décisions que l'on a voulu ou souhaité ... Mais, il en est un autre de courage politique, c'est celui d'arrêter de se voiler la face en pensant que l'évacuation d'un bidonville réglera les difficultés en les repoussant ... ailleurs jusqu'à la prochaine, au risque, à chaque fois, de perdre un peu d'humanité et de bon sens...
Aucun d'entre nous ne prétend qu'il est facile de trouver la bonne solution - l'idée magique - à propos des campements "illégaux" des familles Roms.
Mais de ne pas essayer de s'inscrire dans la recherche de solution alternative, y compris au besoin de réponses territoriales à construire, c'est à une politique du pire à laquelle nous nous exposons collectivement, celle du bouc émissaire.
Ce soir, j'ai honte. J'ai honte - et je ne suis pas tout seul malheureusement - que dans une ville comme la notre, nous ne soyons pas capables de recevoir, puis de prendre le temps, à deux pas d'un futur collège international doublé d'un futur lycée international, de rechercher et de construire avec une ou deux - ou trois, si vous voulez - poignées de familles démunies d'Europe de l'Est, une solution digne et respectueuses de leurs droits...de nos droits.
Etienne DOUSSAIN
Conseiller municipal "Noisy Solidaire, à gauche vraiment !"
commenter cet article …