Une autre contribution récente révèle qu'il pourrait s'agir d'une action systématique d'élus (en mal de promesse électorale ?) sur fond de directive européenne confirmée de mise en concurrence des services de la petite enfance.
Alors pour alimenter le débat, nous la publions :
Quand l'enfant devient une marchandise...
Le cauchemar devient réalité !
« Avec la constitution européenne et la poursuite d'une construction libérale de l'Europe communautaire, c'est la liquidation des services publics et l'entrée en concurrence de l'éducation et du social qui sont programmés ».
Ce discours que de nombreux militants et responsables associatifs tenaient en 2005 au cours de la campagne référendaire de 2005 a été combattu par tous ceux qui cherchaient à enrayer le flot conduisant au rejet du projet de constitution européenne.
François Hollande alors premier secrétaire du Parti Socialiste n'hésitait pas à déclarer : “ On peut dire aujourd’hui que le projet de directive Bolkestein est maintenant arrêté et abandonné. Je pense que cette décision aurait dû être prise beaucoup plus tôt. ”
Aujourd'hui, les masques tombent.
Le rapport du gouvernement français qui a valeur de transposition de la directive Services pour le marché intérieure-appelée directive Bolkestein- s'applique dès ce début 2010. Il s'agit là d'un cadeau royal offert par Sarkozy au secteur marchand.
L’ensemble du secteur de la petite enfance (crèches, halte-garderies) et de l’aide à domicile inclus dans la directive par le gouvernement français entre dans le champ concurrentiel.
L'enfance devient donc clairement une marchandise !
Les collectivités territoriales qui ont confié ces services à des associations d'éducation populaire du secteur non marchand au nom d'une mission de service public de qualité devront lancer un appel au marché « public », dans lequel s'engouffreront de nombreux « entrepreneurs » qui n'ont comme ambition que d'augmenter leurs taux de profits.
Que personne n'affirme que ce secteur n'est pas rentable et n'intéresse pas le secteur marchand ?
Depuis plusieurs années de nombreuses entreprises de crèches demandent et obtiennent de la CAF des subventions d'investissement.
Des municipalités ont déjà inscrit leur action dans la logique de la directive Bolkestein.
Jean Paul Planchou, maire socialiste de Chelles a été un précurseur de la marchandisation, on peut lire d'ailleurs sur le site de la ville l'information suivante :
« En effet, en 2005, la Ville s’était engagée à doubler ses capacités d’accueil d’ici 2015 et le pari est presque gagné. En confiant la création d’une crèche et sa gestion à une entreprise privée, la ville a fait l’économie d’un investissement lourd sans pour autant léser les familles en leur offrant la possibilité d’accéder à une solution de garde au même tarif qu’une crèche municipale traditionnelle »
C'est la société duale qui continue...Il y aura demain des services privés réservés aux plus aisés et des services rendus à l'ensemble de la population, réduits à la portion congrue.
Les contraintes et les logiques ne sont pas les mêmes. Les crèches collectives ou familiales assument avant tout une fonction éducative et de garde alors que les actionnaires et les fonds de pension qui vont se saisir des opportunités offertes recherchent des dividendes.
Les associations familiales, les organisations d'éducation populaire se doivent de mener une action d'information auprès de la population des enjeux de cette décision gouvernementale.
Avec les élus attachés au service public, avec les confédérations ouvrières qui siègent dans les conseils d'administration des CAF, il faut agir pour que le secteur social et éducatif et ses services afférents soient hors champ concurrentiel...
Parallèlement à cette bataille nécessaire et indispensable, il faut absolument que les municipalités résistent c'est à dire maintiennent et développent des crèches territoriales et ne cèdent pas à la tentation de brader les services en cherchant des partenaires privés et notamment les entreprises de crèches.
Jean-François Chalot
Ancien président de l'UFAL de Seine et Marne
Pour mémoire, ce que disait le Parisien en juillet dernier
11.07.2009
A Chelles, une alliance d'un genre inédit va donner naissance, en octobre, à une crèche de 49 berceaux dans le quartier de l'Aulnoy. La municipalité (PS) vient en effet de s'associer à la société Babilou, un partenaire privé, pour se doter d'une nouvelle structure pour les moins de 3 ans. Un mariage de raison… applaudi par les quelque 400 familles chelloises qui attendent une place pour leurs tout-petits. Pour l'entreprise des Hauts-de-Seine, qui gère déjà 37 crèches dans la région et en province, il s'agit d'amorcer son développement vers l'Est francilien. Du côté de l'hôtel de ville, on espère combler le déficit de berceaux en ville. Avec ses cinq crèches municipales, Chelles dispose pour l'instant de 275 places. Un chiffre en hausse mais encore en deçà des ambitions du maire. Dans son programme électoral de mars 2008, Jean-Paul Planchou promettait de « doubler » le nombre de berceaux pour les porter à 420 d'ici à 2015. A six ans de l'échéance, il y a urgence. « On va ouvrir dans trois mois » « Après neuf mois d'études, il nous est apparu que la solution la plus rapide consistait à s'associer à une entreprise conventionnée par la CAF, raconte Annie Ferri, l'adjointe au maire (apparentée PS) en charge de la petite enfance. Construire une crèche nécessite au moins un an de délai. Là, on va ouvrir d'ici trois mois. » La crèche, pas encore baptisée, va être aménagée cet été dans un espace de 515 m 2 , doté d'un jardin de 150 m 2 au rez-de-chaussée d'un immeuble neuf, situé au 55-57 de l'avenue François-Mitterrand. Elle sera entièrement gérée par Babilou, la ville se contentant de louer des places pour ses administrés, au tarif de 9 000 € par berceau et par an. Pour l'année scolaire à venir, la totalité des places seront attribuées par une commission municipale aux familles sur liste d'attente, selon leur situation sociale ou financière. Les tarifs et les conditions pratiqués seront strictement identiques à ceux des crèches publiques municipales. Mais progressivement, Babilou pourra proposer jusqu'à 19 places à des entreprises du secteur qui en feront la demande pour leurs salariés, la ville en conservant au minimum trente. Un système qui déplaît aux élus communistes, seuls à s'être abstenus lors du vote de ce projet au dernier conseil municipal. « Nous comprenons pourquoi Jean-Paul Planchou a fait ce choix de s'associer à une entreprise privée mais nous ne le partageons pas, note Franck Mouly, responsable du groupe PC à la section de Chelles. C'est une privatisation du service public qui ne dit pas son nom. »
Le Parisien
Cet article a été publié dans la rubrique Chelles
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